Lonny + Marcia Higelin

CHÂTEAU ROUGE
mercredi 3 mai à 20h30 jeudi 04 mai à 19h30 vendredi 05 mai à 20h30

Club Café
Placement libre Collation comprise

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Chant, guitare Lonny
Guitare Alexandre Bourit
Basse, Claviers Marie Lalonde

Sur le premier album de Lonny, il y a une chanson qui s’intitule (Not so sad) Love Song. Ce pourrait être le leitmotiv du disque, ourlé de ballades mélancoliques au folk atmosphérique, à la sincérité spontanée et à la pureté intemporelle. On songe à Joan Baez rencontrant Barbara, ou à Joni Mitchell croisant Patti Smith. Pas étonnant que Louise ait choisi le pseudonyme de Lonny pour faire vivre ses chansons : une façon de célébrer la solitude dont elle a besoin pour écrire, et une sorte d’hommage au Loner de Neil Young.
Car à seulement 28 ans, Louise-Lonny a déjà beaucoup bourlingué, sa guitare ou son violon sous le bras, en solo ou en trio sur des scènes pas uniquement hexagonales. Née à la montagne, grandie à Paris, c’est aussi au Québec qu’elle a développé ses talents de musicienne. Elle qui a étudié chant lyrique et violon alto dès son enfance, a toujours su qu’elle choisirait la musique pour s’exprimer. Après les partitions de Bach, la voilà qui reprend les Doors à 17 ans, longtemps avant d’enregistrer un EP de chansons en anglais, intitulé -clin d’oeil à une question qu’on lui posait sans cesse- What kind of music do you play? Au retour d’une tournée au Québec en duo avec le chanteur Florent Bertonnier, alias Refuge, elle prend la décision d’écrire désormais en français. Avec, pour références littéraires, des artistes comme Yves Simon, Véronique Sanson ou Dominique A, et parmi ses livres de chevet, Les Nourritures terrestres d’André Gide.
Not so sad songs, donc. Plutôt un recueil d’impressions et d’émotions aussi intimes qu’universelles les amours qui s’étiolent, le sentiment d’abandon, les affres de la solitude et des relations humaines, les épreuves de la vie. Dans une langue qui privilégie les sonorités au classicisme poétique, les images à la prosodie, comme une écriture automatique aux harmonies mouvantes. Le tout rassemblé sous le titre d’Ex-Voto, terme ambivalent, à la fois prière et remerciement. Comme elle dit : “La musique a une place assez mystique dans ma vie, mes chansons sont de petits ex-votos…”
Pour ce premier opus, Lonny a réalisé un rêve : enregistrer au Canada, la patrie de Leonard Cohen, de Beau Dommage et d’Arcade Fire. Sous la houlette de Jesse Mac Cormack, un artiste québecois d’art-folk découvert en concert, les onze chansons ont ainsi pris forme dans une maison de la banlieue de Montréal, entre l’été 2019 et l’hiver 2020. Cordes et cuivres ont été complétés à Paris, arrangés par le compositeur et multiinstrumentiste Olivier Marguerit.
L’album s’ouvre avec Incandescente, une ode à la résilience qui célèbre “la petite lumière” qui continue de briller en chacun de nous malgré les épreuves. Comme la fin du monde évoque la difficulté de conserver parfois sa liberté et son identité dans certains rapports affectifs. Avril exil, (“écrite le jour de l’incendie de Notre Dame”), illustre l’isolement ressenti après une rupture amoureuse, Éteins la mer s’interroge sur l’héritage familial féminin, souvent interprété comme une inexorable tradition de souffrance. Suivent Mid-Summer et Black Hole celle-ci en anglais-, paraboles sur la renaissance (Lonny est née un 31 juillet, moitié de l’été) et la survivance têtue des souvenirs des amours perdues. La maison des filles, chanson de deuil et d’espérance, fait revivre les fantômes des êtres chers disparus, illustrée par un magnifique clip vidéo entre ombres et lumières.
Enfin, (Not so sad) Love Song en duo avec Refuge, Le Goût de l’orge, hymne à l’Irlande, Le sable normand, instantané d’un moment privilégié et Allez chagrin closent un album aux frissons aquatiques, à la fluidité marine, comme les flux et reflux des vagues sur la grève.
“Quand j’étais petite, avoue Lonny, j’étais persuadée que les sirènes existaient “. La preuve.

Piano, voix Marcia Higelin

Le prénom Marcia évoque une célèbre chanson des années 80 (Marcia Baïla des Rita Mitsouko).
Le nom Higelin compte parmi ceux qui dorent la légende de la chanson française. Marcia Higelin, fille d’Arthur H, petite fille de Jacques Higelin, n’arrive pas dans le métier sans pédigrée. […]
A sa naissance son père réalise une BD faisant office de faire part. L’histoire d’une petite comète venue du fin fond de l’univers arrivant sur terre.
« Mon père m’a beaucoup bercée quand j’étais petite. Mon goût pour le piano s’est nourri de moments où je n’arrivais pas à dormir, où je le rejoignais dans son bureau alors qu’il en jouait, où je m’allongeais pour l’écouter une partie de la nuit. »
Parisienne jusqu’à l’âge de 6 ans, elle suit sa mère et sa petite soeur pour vivre dans une maison isolée près de Grasse. « Il n’y avait pas l’électricité. On s’éclairait à la bougie. Pour faire les courses il fallait faire trois kilomètres à pied jusqu’au village. On vivait au milieu des chiens, des chèvres, des moutons et des chevaux. Là, dans cet environnement, face à la montagne, pour la première fois je me suis sentie légitime d’exister. »
Après un bac passé à Cannes, elle s’installe à Paris où elle déchante avant de revenir dans le sud, à Nice, pour travailler dans un comptoir de restauration rapide tout en s’efforçant de mener des études d’Arabe, d’anthropologie, de sociologie, vite abandonnées. Une rencontre amoureuse plus tard, elle est à Londres puis au Sénégal mais surtout déterminée à réaliser son destin, à rejoindre par la voix et l’écriture une lignée d’artistes incomparables.
« Je suis très fière du nom que je porte. Je n’ai jamais songé à l’escamoter. Lorsque mon père a débuté c’était différent. L’aura de Jacques Higelin était telle qu’elle l’aurait forcément éclipsé. Ce n’est pas mon cas. De toute façon, mon père m’a toujours conseillée d’être fidèle à mon instinct. »
Se rendre digne de son nom sans rien concéder de sa vérité propre. Tel est l’enjeu secret de ce Prince de Plomb où Marcia chante à coeur ouvert, avec dans la voix des nuances qui émeuvent, envoûtent.
Prenant accessoirement en compte le poids ou le prestige de la filiation, la jeune femme s’attache surtout à répondre à une ambition infiniment plus élevée et noble. Quelque chose comme la reconquête de sa souveraineté intime après la déchéance. Passé Lamentations Spectrales, sorte d’adagio aux cordes lacrymales qui plante le décor sonore, elle ouvre avec Dragon, Tigre, ou Loup le premier chapitre de ce qu’elle appelle « la légende personnelle de ma rupture », cette turbulente
odyssée sentimentale qui a mobilisé beaucoup d’énergie négative avant d’en libérer d’autres, plus créatrices. Jetée qu’elle fut dans ce combat solitaire, où il lui semblait essentiel de sauver l’autre pour mieux se sauver elle-même, tel qu’elle l’exprime dans Mauvais Sort, elle a traversé ces moments de révolte que reflètent Prince de Saba, bien décidée à ne pas devenir la nouvelle Dame aux Camélias. Avant de replonger avec Mélopée d’Infortune dans les abîmes de cet amour dont on comprend alors la vraie nature, tyrannique, absolutiste, au travers d’une seule phrase : « Je ne fuis pas la mort ». Qui y a t’il donc en effet que la mort pour confirmer un don de soi sans calcul, sans espérance peut être ? Ici le sentiment par sa profondeur exige la sobre solennité du piano. Avec Les Larmes du Crocodile, qu’elle décrit comme « la bande originale d’un rêve », signe paradoxalement le réveil d’une femme qui aspire à s’affranchir de « cet état de dépression, de vulnérabilité ».
Cette liberté reconquise sur la mélancolie fait de cet EP passionné un moment passionnant, dont la teneur et l’unité l’apparente à une nouvelle romantique et la forme à un chant de l’âme à la jouissive douleur.

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