Mémoire de fille
Mémoire de fille est le récit de ce qu’Annie D. nomme alors – à l’âge de dix-huit ans – sa « première nuit d’amour ».
Première nuit d’amour qu’elle qualifiera « d’évènement traumatique » lorsqu’elle est devenue Annie Ernaux et qu’elle est – enfin – en capacité d’en faire le récit.
Mémoire de fille exprime magistralement comment un événement qui peut sembler ponctuel ou même anodin, le rejet sexuel, amoureux et affectif, peut ravager le corps et l’esprit d’une jeune fille de dix-huit ans jusqu’à un dégoût de soi qui devient une quasi mort intérieure. Les mots stéréotypés de boulimie, d’anorexie, d’aménorrhée s’incarnent dans le corps glacé de cette jeune fille qui se sent incapable d’appartenir à une communauté, qui se sent inexistante. Le retour à la vie, le retour à soi sera lent et douloureux, émaillé de fantasmes de maîtrise de soi, de libérations éphémères et violentes, d’incertitudes sur ce que peut être un choix libre.
Mémoire de fille est publié en 2016 soit un an avant le mouvement Me too – mouvement libérateur de la parole des femmes. Ce sont alors des centaines de récits d’agressions sexuelles et de viols auxquels on fait face sur les réseaux sociaux, prenant ainsi conscience – enfin – du nombre de femmes concernées par ce fléau.
Et c’est comme si Annie Ernaux, portait elle aussi – en elle – cette révolution souterraine, ce besoin – enfin – de mettre des mots sur cet évènement de l’été 58. Comme si elle y était poussée, autorisée avec ce mouvement collectif sur le point d’éclater. Comme si ce livre qu’elle portait et taisait en elle depuis cinquante pouvait enfin exister, comme si c’était enfin possible.
Et moi aussi, comme elles, en 2016, j’écris et mets en scène mon premier texte Depuis l’aube (ode aux clitoris) qui traite du harcèlement de rue, des agressions sexuelles et du droit à disposer de son propre corps.
Annie Ernaux est comme une grande soeur, et ses mots – depuis de nombreuses années m’accompagnent, me guident, ce sont des amis qui ont saisi et compris un pan intime d’une réalité collective, et qui ont su trouver les mots justes, cliniques.
Ce texte résolument moderne fait écho à la jeunesse d’aujourd’hui, à cette jeunesse qui s’apprête à vivre sa première fois, à celleux qui sont en train de la vivre, à celleux qui l’ont déjà vécue.
La langue d’Annie Ernaux est dépouillée, sans fioritures, elle est « à l’os » pour nous raconter ce qui lui a été impossible de mettre en mots pendant 50 ans.
Dans son écriture, on trouve une forme de double narration où le « je » et le « elle » sont indissociables et permettent tour à tour d’éclairer le récit – son récit – autrement. […]
Ce projet que je souhaite tout terrain et à partir de 14 ans porte le cri, l’aveu, le soulagement de dire enfin ce qui a eu lieu cette nuit-là.
Ce projet, je l’imagine à deux voix, brutes, celle de cette jeune fille et de l’Autre.
Il y aura de la musique : celle de la fête de cette nuit-là, mais aussi la musique de l’adolescence, celle qui nous accompagne dans la traversée de cet âge aux multiples mues.
Pauline Ribat
Mise en scène Pauline Ribat
Collaboration mise en scène Vanessa Bettane
Adaptation Pauline Ribat en collaboration avec Vanessa Bettane
Avec Lucie Epicureo et Victor Hugo Dos Santos Pereira
Costumes et accessoires Aude Désigaux
Admin/prod Camille Blouet
Diffusion Histoire de…
Coproduction : Château-Rouge scène conventionnée d’Annemasse, Le Grand Angle – Voiron (en cours)
Partenaires en cours de confirmation : Nanterre Amandiers, Théâtre Alexandre Dumas (Saint-Germain-en-Laye), Les Passerelles (Pontault-Combault)
Aide : Conseil Général de Savoie, Région AURA, Ville de Chambéry
Soutien : Maison Mainou, Théâtre Ouvert, Théâtre du Fil de l’eau
La compagnie Depuis L’Aube est associée à Château-Rouge.